Le décret dit "JADE" (pour "justice administrative de demain") portant modification du code de justice administrative est paru le 4 novembre 2017. Il prévoit une entrée en vigueur au 1er janvier 2017.
Parution du décret « Justice administrative de demain » portant modification du code de justice administrativeLe décret dit « JADE » (pour « justice administrative de demain »), portant modification du code de justice administrative, est paru aujourd’hui au Journal officiel, avec une entrée en vigueur au 1er janvier 2017. Il comporte d’importantes évolutions procédurales destinées à accélérer le traitement de certaines requêtes, à renforcer les conditions d’accès au juge, à dynamiser l’instruction et à adapter l’organisation et le fonctionnement des juridictions administratives à de nouveaux défis.
Accélérer le traitement de certaines requêtes
Les possibilités de rejet par ordonnance prévues par l’article R. 222-1 du CJA sont élargies :
- le pouvoir de statuer par ordonnance pourra être délégué aux magistrats ayant atteint le grade de premier conseiller et ayant au moins deux ans d’ancienneté (alors qu’il était actuellement réservé aux présidents de juridiction et de formation de jugement) ;
- des ordonnances de séries pourront être prises par les tribunaux sur la base d’un arrêt devenu irrévocable pris par la cour administrative d’appel du ressort (alors qu’actuellement, le tribunal ne peut se fonder que sur une de ses propres décisions ou sur un arrêt du Conseil d’État) ;
- les requêtes d’appel manifestement dépourvues de fondement pourront être rejetées par ordonnance, dans tous les contentieux (et non plus seulement en matière d’obligation de quitter le territoire français, comme le prévoyait l’article R. 776-9 du CJA).
De la même façon, l’article R. 822-5 est modifié pour permettre aux présidents de formation de jugement du Conseil d’État ou à des conseillers d’État désignés à cet effet de ne pas admettre les pourvois en cassation manifestement dépourvus de fondement dirigés contre des décisions rendues en appel.
Renforcer les conditions d’accès au juge
L’obligation de liaison préalable du contentieux est étendue de deux façons :
- d’une part, la dispense historique d’obligation de liaison préalable du contentieux en matière de travaux publics, prévue par l’article R. 421-1 du CJA, est supprimée ;
- d’autre part, afin de favoriser le règlement amiable des litiges au stade précontentieux, il est exigé que le contentieux soit lié par une décision expresse ou tacite de rejet avant de saisir le juge d’une demande tendant au paiement d’une somme d’argent (alors qu’actuellement le défaut de liaison du contentieux est régularisable jusqu’à ce que le juge statue : CE 11 avril 2008, Établissement français du sang, n° 281374).
Les cas de dispense d’avocat sont par ailleurs rationalisés.
- La dispense d’avocat est supprimée pour les litiges de travaux publics et d’occupation domaniale (R. 431-3 1°), et, en appel, pour les contentieux d’excès de pouvoir de la fonction publique (R. 811-7).
- En revanche, la dispense actuellement prévue pour les contentieux d’aide sociale et d’aide personnalisée au logement est étendue à tous les « contentieux sociaux », au sens du décret n° 2013-730 du 13 août 2013, c'est-à-dire les litiges « en matière de prestations, allocations ou droits attribués au titre de l'aide ou de l'action sociale, du logement ou en faveur des travailleurs privés d'emploi ».
Enfin, le montant maximal de l’amende pour recours abusif prévue par l’article R. 741 12 du code de justice administrative, fixé à 3 000 euros depuis 1990 et qui n’est plus suffisamment dissuasif, notamment pour les sociétés commerciales, est revalorisé à 10 000 euros.
Dynamiser l’instruction
Dans le prolongement de l’expérimentation menée depuis 2013, les présidents de la formation de jugement ou le rapporteur, sur délégation, pourront, d’office et dans tous les litiges, fixer une date à partir de laquelle des nouveaux moyens ne pourront plus être invoqués (nouvel article R. 611 7 1). Sans qu’il y ait besoin de le préciser expressément dans le texte, cette cristallisation ne concernent pas les moyens d’ordre public et est instaurée sous réserve des dispositions contraires s’y opposant (par exemple : article L. 199 C du livre des procédures fiscales qui permet au demandeur de soulever tout moyen jusqu’à la clôture de l’instruction). Le délai minimum avant la cristallisation est fixé à un mois, qui correspond au délai communément imparti pour produire un mémoire en réplique.
Les présidents de formation de jugement ou les rapporteurs, sur délégation, pourront également demander aux parties des éléments ou des pièces complémentaires après la clôture d’instruction sans réouverture de celle-ci, à l’instar de ce que prévoit déjà l’article R. 611-7 en cas de communication d’un moyen d’ordre public.
Le président de la formation de jugement pourra enfin sanctionner par un désistement d’office l’absence de production, dans le délai imparti, d’un mémoire récapitulatif (art. R. 611-8-1) ou de réponse à une demande de confirmation du maintien de la requête, lorsque l’état du dossier permet de s’interroger sur l’intérêt qu’elle conserve pour son auteur (art. R. 612-5-1).
Améliorer l’organisation et le fonctionnement de la juridiction administrative
Le rôle des greffiers dans la conduite de l’instruction est expressément reconnu.
En cas de requête ou de défense présentée par plusieurs auteurs, la décision juridictionnelle pourra être notifiée au seul représentant unique qui sera, par défaut, le premier nommé.
Les conditions de désignation des formations de trois juges des référés créées par la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires ainsi que les mentions que doivent revêtir les ordonnances rendues par ces formations sont précisées.
Enfin, le contentieux des mesures d’éloignement lorsque le requérant est placé au centre de rétention n° 3 du Mesnil-Amelot est transféré au tribunal administratif de Montreuil. Cela permettra de décharger le tribunal administratif de Melun de près de la moitié de ce contentieux, alors que, depuis la fermeture du centre de Bobigny en juin 2013, le tribunal administratif de Montreuil n’a plus de contentieux de l’éloignement « 72 heures ».
Rapport sur la justice administrative de demain : |